Définition détaillée

LA FORÊT NOURRICIÈRE OU POTAGER-FORESTIER

On y pratique de fait une culture biologique et permanente, dite permaculture. Conformément à cette approche, on utilise peu d’irrigation, pas d’intrant chimique, pas de sarclage et pas de labour afin de ne pas détruire la pédofaune et la structure du sol garant d’une bonne fertilité du sol. La permaculture potagère-forestière repose sur l’association entre les arbres, les arbustes et les herbacées comme en milieu forestier.

La productivité primaire nette d’une forêt tempérée caduque est deux fois celle d’une terre cultivée moyenne (1 200 g m.s./m²/an – gramme de matière sèche par mètre carré et par an – contre 650 g m.s. /m²/an), du fait d’une utilisation de l’énergie, de l’eau et des nutriments beaucoup plus efficace. (démontré par l’écologue Robert Harding).

Un des modèles fondamentaux est composé de dix strates :

Image Potagers-Forestiers Strates

  • La canopée (fruitiers ou noix ou fixateurs d’azote)
  • la couche des arbres intermédiaires (petits fruitiers ou noix ou fixateurs d’azote)
  • les arbustes (à baies ou aromatiques ou fixateurs d’azote)
  • les herbacés (plantes aromatiques et médicinales,légumes vivaces, accumulateurs de minéraux)
  • les plantes de couverture (couvre-sols)
  • la rhizosphère (plantes racines)
  • la strate verticale (lianes, vignes)
  • la mycosphère
  • l’aquaponie
  • l’apiculture.

En ceci, l’établissement d’un sol comparable au sol forestier est fondamental. L’accent y est mis sur la couverture permanente du sol par paillage comme dans les écosystèmes naturels forestiers, où feuilles, branchages et autres déchets organiques forment une litière permanente qui, avec le temps, se transforme en humus.

Une forêt nourricière est donc un potager-forestier modelé sur la structure d’un boisé naturel. C’est en fait un système rigoureusement dessiné en vue de favoriser des relations synergiques durables entre les différentes couches de végétaux le composant.

Presque toute la végétation est vivace, ce qui en fait un écosystème qui perdure dans le temps. Plusieurs des plantes ont des fonctions multiples et bénéficient de la présence des autres. La fertilité est maintenue largement par les plantes elles-mêmes. Par exemple, on fait fortement usage de plantes fixatrices d’azote et d’autres plantes en mesure de ramener des nutriments du sous-sol. La santé du jardin est aussi augmentée par l’usage de plantes attractives pour les prédateurs des ravageurs et par des plantes qui réduisent les problèmes de maladies.

Conséquemment, il est donc important d’établir des guildes comportant une variété de plantes performant les fonctions suivantes :

  • Fixateur d’azote pour approvisionner les autres plantes en azote ;
  • Accumulateur de minéraux les rendant disponibles pour les autres plantes ;
  • Attracteur d’insectes bénéfiques contre les ravageurs ;
  • Attracteur de pollinisateurs ;
  • Systèmes racinaires différents et complémentaires pour exploiter l’espace du sous-sol de façon effective ;
  • Confusion sexuelle des ravageurs ;
  • Stimulation pour le système immunitaire (ex. aromates anti-fongiques contre la tavelure) ;
  • Couverture dense de la surface du sol.

Étant donné la grande biodiversité et la versatilité des végétaux d’un potager-forestier, ceux-ci sont donc d’une grande utilité tout en produisant des aliments supérieurs sur le plan nutritionnel.

Les champignons mycorhiziens sont probablement les plus importants organismes de la forêt nourricière. Ils participent à la mobilité des nutriments assurant ainsi leur répartition équilibrée dans le sol. Ils forment une association symbiotique avec presque toutes les racines existantes en leur relayant des nutriments (minéraux, eau) puisqu’ils peuvent les capter de façon beaucoup plus efficace que les plantes. En plus, ils protègent les plantes des maladies. En échange, les plantes fournissent de l’énergie aux mycorhizes sous forme de sucres. Les plantes fixatrices d’azote enrichissent ainsi le milieu via la complicité des champignons. Cette association est encouragée en évitant les perturbations du sol et par les amendements en matière organique et ligneuse.

Avantages de la forêt nourricière

  • Travail avec le terrain plutôt que contre lui (adaptation aux conditions) ;
  • Peu d’entretien et haute efficacité, le sol se maintient en très bonne condition ;
  • Large éventail de produits tel que fruits variés, légumes, champignons, etc ;
  • Haute valeur nutritionnelle, les vivaces étant plus nutritives que les annuelles ;
  • Résilient au climat extrême, les systèmes forestiers étant les plus résistants ;
  • Biologiquement durable par la biodiversité et les interactions sous et hors sol ;
  • Esthétiquement beau, se reconnectant avec l’abondance de la nature ;
  • Création d’une multitude d’habitats fauniques par la structure hétérogène du système et l’exploitation de plusieurs strates végétales ;
  • Amélioration de la qualité de vie aux alentour : diminution des îlots de chaleur, des bruits, des poussières et aérosols, etc. ;
  • Possibilité de s’interconnecter avec un projet de trame verte et de corridor faunique.

De plus, ces systèmes permettent un stockage plus important et permanent de carbone dans leur biomasse vivace que dans les systèmes conventionnels. Ces derniers requièrent des applications d’engrais et de pesticides alors que les effets nocifs liés à l’utilisation de ces produits sont complètement évités dans une forêt nourricière.